| | Introduction | Chapitre 1 | Chapitre 2 | Chapitre 3 | Conclusion | Bibliographie | Annexes | Remerciements
Bultex
Literie composée du matériau Bultex
Publicité en deux parties. La première, composée de l’ouverture et du développement est une courte histoire et la deuxième, composée de la clôture est la présentation de la marque avec le slogan en voix-off.
L’histoire est simple et peut se décomposer en trois sous-parties :
Le dernier plan représente le logo animé de la marque (voir image 9).
Une bille rouge tombe sur une ligne bleue représentant un matelas. Celui-là en épouse la courbe.
1 S'opposant à implicite
Cette publicité possède deux types d’orientations persuasives, la plus évidente est celle que développe la jeune femme pour vanter les mérites des matelas de la marque. Elle est explicite 1 et diégétique. L’autre est extradiégétique, c’est à dire qu’elle ne fait pas partie du scénario mais est symbolisée par certains détails des images et des personnages.
A première vue elle ressemble à une accumulation d’arguments coorientés à laquelle s’ajoute une argumentation par la preuve :
Mais quand on regarde cette argumentation, on s’aperçoit que ce n’est qu’un habile enchaînement implicatif : a entraîne b qui entraîne c. d et e sont donnés pour des preuves visuelles.
La jeune femme nous a seulement dit que Bultex est confortable et que la vue de son corps parfait en est la preuve. Or un matelas n’entraîne malheureusement pas forcément un corps parfait.
Elles sont plus riches et nombreuses, car ce que l’on a pas le droit de dire, on peut le faire sous-entendre.
On trouve facilement une isotopie médicale :
Ces deux faits permettent d’inférer l’argument suivant : «le matelas Bultex est bon contre le mal de dos»
De plus, la présence de la jeune femme qui n’est pas malade, au contraire (voir transcription) laisse supposer que ce n’est pas une patiente, mais une personne du corps médical connaissant bien les problèmes de dos. Son explication en est aussi une “preuve”, si on tient compte du fait que pour que le public ait un ressenti technique dans un discours situé dans une histoire il faut qu’il soit caricatural (la radiographie de la jeune femme qui représente des courbes élégantes et raffinées et le matelas) mais compréhensible. D’ou un deuxième argument implicite : «le matelas Bultex est recommandé par la Faculté».
On a ici une tentative avortée de négociation pour la position haute.
La jeune femme se l’octroie en engageant la conversation, ce qui viole le principe doxatique voulant que ce soit l’homme qui engage la conversation et elle le fait brutalement par une question indiscrète, violent FTA, qu’elle n’adoucit par aucune formule de politesse. Le seul anti FTA qu’elle utilise est son physique. L’homme, loin d’être vexé, est tout content et continue la conversation et essaie de reprendre cette position haute en lançant comme sujet de conversation son lumbago. Cette tentative échoue, la jeune femme la réduisant en miettes car elle ne plaint pas H, mais au contraire lui explique et lui montre pourquoi elle est en pleine forme. On constate au passage que l’homme subjugué ne tente plus rien (Son regard libidineux quand il suit les courbes de la radiographie de la jeune femme est sans équivoque. Il ne suit pas la conversation.
Pour la jeune femme, qui écrase l’homme, son air hautain et son sourire ironique peuvent s’interpréter comme du dédain.
L’homme reste donc en position basse, tellement basse que la jeune femme s’en va sans le regarder. Il essaie bien d’attirer son attention en la suivant avec une démarche à la Aldo Maccion et en l’interpellant, peine perdue.
Cette ligne argumentative est coorientée avec les autres.
La jeune femme a un matelas Bultex et domine la situation alors q ue l’homme qui n’en a pas est dominé (au propre comme au figuré)
Aucune argumentation dans cette publicité. Toutes les orientations persuasives sont coorientées vers la conclusion «achetez un matelas Bultex»
On constate que l’argumentation explicite est une habile illusion puisqu’elle n’a qu’un seul argument pour convaincre le spectateur : la notion de grand confort. Cet argument est répété plusieurs fois.
On trouve la plus grande richesse dans les orientations persuasives implicites, qui sont non réglementées. On trouve une pseudo-argumentation médicale et une pseudo-argumentation de domination qui font du pro duit un objet hors du commun puisqu’il permet d’être beau, en pleine forme et de dominer.
Le slogan de la marque joue sur cette même dualité. On retrouve la notion de corps ayant besoin du produit qui évoque explicitement une idée de confort et implicitement fait ressurgir notre isotopie médicale par le jeu du syllogisme valide :
avec x = le téléspectateur ou x= le corps du téléspectateur et B le produit vanté
non ( x possède B )
Or ( corps de x réclame B)
Donc ( x achète B)
Ce syllogisme est fallacieux si on n’envisage pas le coté remède miracle, et pour le rendre valide il faut interpréter « réclame » par «souffre de ne pas avoir».
Cette interprétation forcée nous montre bien l’utilisation de l’argumentation dans la publicité. Elle n’est pas valide directement et il faut admettre des sous-entendus qui seraient considérés comme de la publicité mensongère s’ils étaient explicités. Le but ici n’est pas d’argumenter mais de convaincre en feignant l’argumentation par ce que nous appelons des orientations persuasives.